29 janvier 2009

La corrida de l’amour

Grandes consommatrices et égéries de la culture masculine, les femmes n’ont jamais obtenu la réciproque, au point que chaque génération de critiques ou de journalistes distraits ou mal informés s’étonne et se scandalise à chaque époque de la popularité du roman d’amour, pour l’oublier aussitôt. Or le roman d’amour a plus de 200 ans et il les a traversés sans heurt et sans changer ses éléments essentiels.

L’étude du roman Harlequin par un groupe de recherche de l’UQAM, sous la direction de Julia Bettinotti, est instructive et captivante. Elle porte sur le texte même du roman Harlequin.

L’étude compte sept volets :

1. – Les Entreprises Harlequin
2. – Les personnages
3. – Le point de vue
4. – Les espaces et le temps
5. – Scénario et motifs
6. – La confrontation polémique
7. – Le mariage

L’ouvrage est complété par une bibliographie et des annexes.

L’analyse est claire et ses éléments bien synthétisés. Voyons deux exemples :

«Ainsi, le roman Harlequin s’ouvre invariablement sur la rencontre de l’héroïne et du héros, pour se refermer sur leur mariage. Entre ces deux pôles, s’imbriquent la confrontation polémique, la séduction et la révélation de l’amour.» (Scénario et motifs, p. 67)

«La confrontation polémique est propre au roman Harlequin. Elle connaît un formidable développement, un déroulement spectaculaire : elle envahit chaque page. […] Elle est au roman d’amour ce qu’est le cadavre au roman policier : son principe, son générateur, sa matière, sa spécificité, son départ et son élan.» (La confrontation polémique, p. 89)

La conclusion est aussi incisive :

«Les caractéristiques propres à la réalité que vivent les femmes sont on ne peut plus présentes dans le roman Harlequin. Elles font partie de leur dimension cognitive, de leur connaissance du monde, et elles sont un facteur important de la compréhension et d’une juste appréciation du texte. […] Loin d’être un roman d’amour, ce type de texte montre avant tout les peurs, les frustrations et la difficulté d’être femme dans un monde masculin, et illustre dans son ensemble la même situation que les analyses féministes dénoncent.» (p. 106-107, 109)

J’ai lu ce livre après avoir écouté, en baladodiffusion, une conférence de Jean-Yves Mollier sur la culture de masse. Au cours de son exposé, ce professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Versailles a rendu un vibrant hommage à Julia Bettinotti et à son étude sur le roman Harlequin.

Référence

Bettinotti, Julia, dir. – La corrida de l’amour : le roman Harlequin. – Montréal : UQAM, 1986. – 161 p. – ISBN 2-82276-027-5. – Cote BAnQ : 809.385 C825co 1986. – [Citation liminaire : p. 14].

Réédition :

Bettinotti, Julia, dir. – La corrida de l’amour : le roman Harlequin. – Montréal : XYZ, 1990. – 151 p. – ISBN 2-8926-1026-5. – Cote BAnQ : 809.385 C825 1990.

Sur la Toile

Département d’études littéraires (UQAM)

Éditions Harlequin (France)

En France, il se vend un Harlequin toutes les 3 secondes! […] Plus de 50 millions de lectrices dans le monde lisent des romans Harlequin, dans 26 langues.

Mollier, Jean-Yves. – La naissance de la culture de masse dans le monde aux XIXe et XXe siècles. – Montréal : BAnQ, 10 juin 2008. – (Baladodiffusion).

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