27 février 2016

La naissance de l’Eurasie


Le professeur émérite et archéologue britannique Barry Cunliffe a publié récemment une synthèse remarquable sur la naissance de l’Eurasie: By Steppe, Desert, and Ocean, aux Presses de l’Université Oxford.

Dans sa préface, l’auteur indique de but de son ouvrage: «This book is an attempt to explore the two big themes, connectivity and mobility, as they developed throughout Eurasia from early prehistory, binding the world into a single system by the fourteeth century AD.»

Le premier chapitre présente les clés de son interprétation de la genèse eurasienne. Plusieurs facteurs peuvent expliquer le développement social et économique du contient, mais deux sont reconnus comme fondamentaux par les archéologues: les changements climatiques et démographiques. Pour comprendre l’évolution humaine, il faut considérer les interactions entre la géographie physique et les comportements humains.

L’auteur poursuit cette mise ne scène en présentant un portrait global de la géologie de l’Eurasie. Ensuite, il s’attarde à décrire les traits primordiaux de ce continent: l’armature montagneuse, le corridor des steppes, les déserts discontinus entre les chaînes de montagnes et les steppes, les océans riverains de cet espace eurasiatique.

Les développent initiaux du Sud-Ouest asiatique et l’Asie orientale sont abordés plus spécifiquement dans la troisième partie de ce premier chapitre.

Les dix chapitres suivants illustrent cette approche géohistorique. Ils sont suivis d’un chapitre récapitulatif et conclusif. Tous les chapitres contiennent de nombreuses cartes historiques et de superbes photographies, avec leur légende respective.

Le livre est complété par des outils de repérage: orientations bibliographiques, sources des illustrations et index.

Un livre de référence exemplaire écrit dans un style limpide et captivant.

Référence

Cunliffe, Barry. - By Steppe, Desert, and Ocean: The Birth of Eurasia. - Oxford (Grande-Bretagne): Oxford University Press, 2015. - x, 530p. - ISBN 978-0-19-968917-0. - [Citation, p. vii]. - BAnQ: 930 C9728b 2015.

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1742 - Eurasie (Empire mongol) - Imperium mugalicum vel Zingis Canicum et successorum imprimis sub cublai post anum ejus initialem circa a.c. 1257 / [tirée de hasius] - Johann Matthias Hase (1684-1742), cartographe - (Nuremberg) - Source: gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France (BnF).

20 février 2016

Destination Canada / Sources d’informations


Dans un article publié dans la revue américaine Online Searcher, Lisette Lacroix présente une sélection de sources d’informations produites au Canada, dont plusieurs éditées au Québec. La plupart de ces ressources sont disponibles en français.

La première partie de la recension de ces sources documentaires de qualité concerne les bases de données gratuites. Plusieurs sites du gouvernement fédéral du Canada sont passés en revue: Statistique Canada, Industrie Canada, Pêches et Océans Canada, Agriculture et agroalimentaire Canada, Conseil national de recherches Canada, Bibliothèque scientifique nationale, Banque du Canada. Des instituts de recherches privés sont ensuite cités: C.D. Howe Institute, Conference Board du Canada, Institut Fraser, Centre for International Governance Innovation.

La deuxième partie de l’article est dédiée à des bases de données payantes: ProQuest’s Canadian Business & Current Affairs, EBSCO’s Business Source Complete, Infomart, SEDAR. L’auteure souligne aussi l’excellente représentation du Canada dans plusieurs grandes bases de données internationales, dont ScienceDirect, Scopus, Web of Science, JSTOR.

Des centres d’excellence sont présentés dans la troisième partie: Biodiversity Institute of Ontario, Canadian Center for DNA Barcoding, Barcode of Life Data Systems, Oceans Network Canada, ArcticNet (Université Laval).

Dans un encadré, l’auteure liste des sources d’informations supplémentaires: Encyclopédie canadienne, Canadiana, Publications du gouvernement du Canada, Bibliothèque et Archives Canada (BAC), Parlement du Canada, Archives de Radio-Canada, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), Collection numérique de BAnQ, Érudit, Eureka.

Destiné à un lectorat américain, cet article saura aussi rendre service aux internautes francophones.

Remarque

Les abonnés à BAnQ ont accès gratuitement à des centaines de bases de données, dont plusieurs sont recensées dans l’article de Lisette Lacroix.

Référence

Lacroix, Lisette. - «Destination Canada. A Gateway to Canadian Information Sources». - Online Searcher, janvier-février 2016, vol. 40, n° 1. - ISSN 2324-9684. - P. 19-23. - [Cette revue est disponible à la Grande Bibliothèque de BAnQ].

Destination Canada: A Gateway to Canadian Information Sources
How well do you know Canada? If it's just Cirque du Soleil and ice hockey, Canadian Lisette Lacroix is here to expand your horizons by introducing you to websites from the Canadian government, think tanks, subscription databases, and centers of excellence.
By Lisette Lacroix

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Canada (Gouvernement fédéral du Canada)

13 février 2016

L’Assassinat de la rue Saint-Roch / Alexandre Dumas


La nouvelle

Les Éditions Fayard ont publié récemment le manuscrit inédit L’Assassinat de la rue Saint-Roch d’Alexandre Dumas. Cette nouvelle commence par une longue Préface dédiée comme le reste de la publication à Monsieur le Préfet de Police de Naples. Elle est suivie du récit proprement dit L’Assassinat de la rue Saint-Roch.

Dans la première partie de la préface, Dumas décrit l’incompétence générale ou circonstancielle des préfets de police. Il leur reproche spécifiquement leur manque d’analyse. À titre d’exemple, il cite plusieurs préfets ou lieutenants de police: Spaventa, Le Noir, de Sardine, Foucher, Vidocq et Canler. Plusieurs erreurs judiciaires illustrent ses propos.

Dans la partie suivante, l’auteur s’attarde à expliquer l’importance vitale des facultés analytiques requises pour exercer le métier de préfet de police. Il en fait même le but de sa nouvelle: «Le récit qui va suivre […] sera pour le lecteur un commentaire ingénieux des propositions que je viens d’avancer.»

Dans la dernière partie de sa préface, le nouvelliste présente le contexte de son récit. Le fait divers se déroule à Paris en 1832. Le protagoniste est le célèbre auteur américain Edgar Allan Poe (1809-1949), le narrateur agissant comme faire-valoir: «[…] je ne pouvais m’empêcher de remarquer et d’admirer […] une aptitude analytique particulière chez mon compagnon.»

Dès les premières lignes du récit, le lecteur prend connaissance du fait divers faisant l’objet de la nouvelle, tel que relaté dans la Gazette des Tribunaux, sous le titre évocateur Double assassinat des plus singuliers. Le numéro suivant publié par ce journal fait état des déclarations de plusieurs témoins. Rapidement, le lecteur attentif, celui qui est amateur de fictions policières, retiendra certains détails langagiers.

Dans la suite du récit, le lecteur découvre les explications ingénieuses d’Edgar Allan Poe au cours de ses multiples démarches et de ses perspicaces réflexions pour élucider le double meurtre de la rue Saint-Roch et identifier le coupable.

La nouvelle se termine par une morale en lien avec les propos tenus dans la préface de l’auteur narrateur.

Le paratexte

Les textes d’accompagnement de la nouvelle par Jocelyn Fiorina sont nombreux: Sommaire, Note sur l’édition, Avant-propos, Notes sur le texte, Analyse (Décoder Dumas: l’énigme politico-littéraire dans L’Assassinat de la rue Saint-Roch), Sources et autres pièces à conviction. Ces divers textes comptent 130 pages, alors que la nouvelle de Dumas en compte 60.

La Note sur l’édition indique que la nouvelle de Dumas est parue en feuilleton dans un journal napolitain, du 28 décembre 1860 au 8 janvier 1861. La première partie du manuscrit original, en français, a été découvert en 2014 par Jocelyn Fiorina. Dans son Avant-propos, celui-ci relate les circonstances de cette découverte et de la publication de la nouvelle, d’abord sous le pseudonyme David Ianiroff, en 2013 (traduction du texte italien), puis sous son nom, en 2015 (première partie du texte original en français et traduction en français de la seconde partie de la nouvelle).

Les sept Notes sur le texte ont trait principalement aux personnages cités dans la nouvelle.

L’analyse de Fiorina est le plus long texte d’accompagnement. Elle est structurée en plusieurs parties détaillées dans le Sommaire de l’ouvrage. Dès le premier paragraphe de son étude, l’auteur souligne l’importance de son essai: «Le lecteur pourrait penser que les noms, lieux et dates de la nouvelle L’Assassinat de la rue Saint-Roch sont purement anecdotiques et ne sont guère signifiants. Ce serait une erreur, ils sont au contraire autant d’indices, dont l’analyse donne un singulier éclairage sur les aspects secrets des vies de Dumas et de Poe dans la période révolutionnaire du début des années 1830, à Paris.» La lecture de cette enquête analytique entreprise par Fiorina est passionnante: «L’énigme de l’assassinat de la rue Saint-Roch a été résolue, l’énigme dans l’énigme commence…»

Le dernier texte d’accompagnement correspond à une bibliographie: Sources et autres pièces à conviction, Théories inventées ou romancées sur la rencontre entre Poe et Dumas, Autres œuvres de Dumas, Autres œuvres d’Edgar Allan Poe. Une présentation de La Petite Collection des Mille et une nuits (Librairie Arthème Fayard) suit cette bibliographie.

Quel plaisir de lire la nouvelle L’Assassinat de la rue Saint-Roch d’Alexandre Dumas et son analyse par Jocelyn Fiorina «plus de cent cinquante ans après sa première publication en italien».

Référence

Dumas, Alexandre. - L’Assassinat de la rue Saint-Roch. - Manuscrit inédit suivi de Décorer Dumas: l’énigme politico-littéraire dans L’Assassinat de la rue Saint-Roch, par Jocelyn Fiorina. - Couverture d’Olivier Fontveille. - Paris: Fayard, 2015. - 190p. - (Mille et une nuits, n° 646). - ISBN 978-2-75550-745-4. - [Citations, p. 22, 25, 81 et 5]. - Bibliothèques de Montréal et BAnQ: Dumas D8862a.

Carte

Paris (extrait / quartier et rue Saint-Roch) - Révolution de 1830. Plan des combats de Paris aux 27, 28 et 29 juillet / J. B. François-Étienne Ajasson de Grandsagne, Maurice Plant (Paris) - Source: gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France (BnF).

Le quartier et la rue Saint-Roch sont décrits par Jocelyn Fiorina, notamment aux pages 155 et 167-170 de son essai.

06 février 2016

Les murales de Cacaxtla

The Cacaxtla paintings invite us to interrogate the very nature of the shared Mesoamerican heritage.

Les Presses de l’Université du Texas ont publié récemment un livre magnifique sur les murales de Cacaxtla, un site archéologique situé au sud-est de Mexico. Son auteure, Claudia Brittenham, est professeure d’histoire de l’art à l’Université de Chicago.

La première découverte des superbes peintures mésoaméricaines est survenue en septembre 1975. Depuis cette date, environ le tiers de l’acropole de la cité amérindienne a été fouillée par des archéologues de l’Institut national d’archéologie et d’histoire (INAH) du Mexique.

La première partie du livre contient la table des matières détaillée, la liste des illustrations, l’avant-propos de Maria Teresa Uriarte Castaneda, les remerciements de l’auteure et l’introduction. La deuxième partie de l’ouvrage contient sept chapitres. La troisième partie contient la conclusion, des annexes, les notes, la bibliographie et un index. Le livre est abondamment illustré par de superbes photos légendées et des schémas explicatifs.

L’introduction retrace d’abord les jalons des fouilles archéologiques sur l’acropole de Cacaxtla. Les divers chapitres sont ensuite présentés. L’auteure souligne aussi l’une des grandes particularités de son livre: l’exploration des murales suit la séquence chronologique de leur création et non l’ordre de leur découverte. Cette dimension favorise la compréhension de l’évolution et de la complexité de la création artistique chez les peintres autochtones.

Le premier chapitre présente le contexte général Cacaxtla. Le schéma de l’acropole est particulièrement utile pour suivre les explications de l’auteure. Le site est divisé en trois grandes zones (sud, centre, nord), chacune ayant une place centrale située à des niveaux différents. Le schéma rend bien compte de cette complexité en présentant à la fois le plan de l’acropole et trois coupes du site.

Trois cartes sont également insérées dans l’introduction: 1° la vallée Puebla-Tlaxcala (premier millénaire avant Jésus-Christ), avec deux cartons sur les routes commerciales (au cours de l’empire de Teotihuacan et après l’effondrement de cet empire), 2° l’itinéraire suivi par le peuple Olmeca Xicalanca dans la vallée de Puebla-Tlaxcala, selon Diego Munoz Camargo (v. 1585), 3° la Méso-Amérique, avec le relief de cette région et la localisation des principaux sites mentionnés dans l’exposé de l’auteure.

Les relations entre l’acropole de Cacaxtla et la colline sacrée de Xochitécatl, distante d’un kilomètre, sont ensuite expliquées à l’aide de photos, de photos satellite et d’une carte de Xochitécatl de 1632. Après le 11e siècle, les deux sites sont abandonnés et tombent dans l’oubli.

La deuxième partie de l’introduction traite de la problématique des sources documentaires (objets et écrits) sur Cacaxtla, puis relate l’histoire de cette acropole dans le contexte global du monde mésoaméricain de l’époque. L’auteure décrit les productions artistiques distinctes de Teotihuacan et Cholula, cités rivales entre lesquelles est située Cacaxtla. Les murales de Cacaxtla datent de la période consécutive à la chute de Teotihuacan, un événement majeur pour toute la Méso-Amérique survenu vers 650. L’art cosmopolite de Xochicalco est illustré. Cet art se développe dans le contexte général de l’innovation et de la diversité à travers toute la Méso-Amérique, du 7e au 10e siècle. Dans ce nouveau contexte chaotique et novateur, Cacaxtla décide alors de réinterpréter son histoire en transformant son art public à des fins identitaires et politiques.

Le très court chapitre 2 porte sur les matériaux et les techniques, les artistes et la chronologie. Les chapitres suivants sont dédiés à l’analyse détaillée de six murales de Cacaxtla: le Corridor du serpent et l’Escalier aux esclaves (chapitre 3); le Temple de Vénus (chapitre 4); la murale de la Bataille (chapitre 5); le Temple rouge (chapitre 6); la Structure A: la Montagne de la subsistance (chapitre 7). Les descriptions minutieuses de chacune de ces murales, avec leurs diverses interprétations, sont fascinantes. Par ailleurs des plans détaillés accompagnent les exposés, notamment ceux des pages 143, 148 et 184.

Dans la conclusion, l’auteure souligne le nombre restreint des œuvres étudiées. Elle rappelle ensuite les caractéristiques de la tradition picturale des artistes de Cacaxtla, une tradition sans cesse renouvelée au fil du temps et des créations résultantes.

La lecture de ce livre de référence est instructive et captivante!

Référence

Brittenham, Claudia. - The Murals of Cacaxtla. The Power of Painting in Ancient Central Mexico. - Avant-propos de Maria Teresa Uriarte Castaneda. - Austin: University of Texas Press, 2015. - xx, 295p. - ISBN 978-0-292-76089-9. - BAnQ: 972.47 B8629m 2015. - [Citation, p. 220].

Sur la Toile

Cacaxtla (George Kubler, Marta Foncerrada de Molina, Donald Roberston, Merle Greene Robertson) (Mesoweb)

Instituto Nacional de Antropología e Historia (INAH)

Mexican murals reveal art’s power (Susie Allen, The University of Chicago, 5 janvier 2015)